Fuji-san 3 : Le retour du Fuji
La Trilogie Fuji-san | ||
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1. Le Mont Fuji | 2. Lever du soleil au Mont Fuji | 3. Le retour du Fuji |
La veille, alors chez 島田さん, je lance mon interrogation. Le proverbe "富士山に 登らない馬鹿 二度登る馬鹿", traduisible en "Celui qui n'a pas gravi le mont Fuji dans sa vie est un idiot. Celui qui l'a gravi deux fois, aussi", ne dit pas ce qu'il se passe si on le grimpe une troisième fois. Bien qu'avec un peu de bon sens on déduit que celui qui le grimpe 3 fois le grimpe 2 fois, j'espérais une nouvelle règle magique qui fasse revenir le sort dans le positif.
Hé ben non, 島田さん est catégorique : celui qui le grimpe 3 fois est "encore plus idiot".
C'est vrai que c'est pas malin d'y retourner une deuxième fois, dans cette semoule volcanique. Et puis tout le monde sera d'accord pour dire que la vue du sommet du toit du Japon, à 3776 mètres, ne vaut pas un clou comparé à la vue du Fuji de loin.
Ce n'est toutefois pas ce qui m'en empêchera. Si on continue dans la croyance aux dictons, il ne reste qu'à contre-attaquer avec le "Jamais deux sans trois", mais j'en avais même pas besoin. La première fois, Fuji-san était bouché. La seconde, le lever du soleil était magnifique. C'est parti pour la troisième …
On part le matin du dimanche 20 juillet, car c'est le premier jour où on peut utiliser le 青春18切符 Seishun 18 Kippu (S18K), le billet de train pas cher, et car le lundi 21 est férié. Par contre, c'est seulement pour les trains lents, et il faut partir tôt de Kyoto. Ce qui, le temps de planifier ces mini-vacances au Fuji et à Hakone pendant la nuit, n'est pas possible. D'ailleurs, pour planifier la montée du Fuji, c'est facile. Il suffit de consulter la description des 4 différentes routes, puis les horaires des bus, et c'est tout.
On arrive à la station 山科 Yamashina à 8 heures pour prendre le train JR. Mais il y une queue gigantesque à la billetterie humaine, celle qui permet d'acheter le fameux S18K, et le dernier train qui nous permettre d'arriver à temps au pied du mont Fuji pour la dernière navette est sur le point de partir. On est donc obligés d'acheter un billet simple à 140 yen à la billetterie automatique et sauter dans le train.
On est donc avec le ticket le moins cher, insuffisant pour notre trajet, et si on descend comme ça à la dernière station, on paye plein pot. Alors qu'avec le S18K, c'est le même prix (2300 yen en moyenne) quelque soit le trajet. Au premier arrêt intermédiaire, je vais donc acheter ce ticket, mais le gars borné du guichet refuse de le vendre à l'intérieur de la gare, il dit qu'il faut payer pour sortir, acheter le S18K au même guichet, mais depuis l'extérieur, puis re-rentrer avec ce ticket illimité pour la journée, qui rend donc absurde le fait de payer pour sortir en premier lieu. On est comme dans une boucle infinie du programme planté, mais le Japonais n'étant pas équipé de bouton "reset", il faut discrètement sortir de la gare pour re-rentrer en légalité. S'il y a un truc manquant parmi leurs 800.000 règles, c'est bien une pincée de bon sens.
Par contre, en courant entre 2 trains pour aller faire des petites courses, j'ai réveillé une douleur derrière mon genou droit qui me fait boiter. Il faut alors changer les plans. On pensait grimper le Fuji par la 御殿場 Gotemba route, la plus longue et moins fréquentée, celle qui part le plus bas, dans la forêt à 1440 mètres. Mais en boitant, c'est pas la joie. Alors on change pour la 富士宮 Fujinomiya, la plus courte (départ à 2400 mètres), raide, et soi-disant fréquentée. Pour info, les 2 années précédentes, j'avais fait la 須走 Subashiri.
Ce changement de plan nous déstresse, car le dernier bus qui rejoint le départ de la Fujinomiya route est 1 heure plus tard que le bus qui rejoint le départ de la Gotemba route. On en profite pour marcher dans 富士市 la ville de Fuji, morte.
Les deux heures de bus de 新富士 jusqu'à la 5ème station, le départ de la marche, sont très longues et on s'endort. Mais au réveil, nous voilà dans une forêt de brouillard intimidant … et il se fait plus frais. On est largué dans la nuit sur le parking de 富士宮 Fujinomiya, 5th station.
富士宮 Fujinomiya 5th station, parking brumeux
Dernier relais avant le chacun-pour-soi
Et bien sûr, un dernier magasin de souvenirs ridicules
Au relais, on s'habille chaudement, avale notre dernier repas. C'est alors qu'il faut estimer le paramètre le plus crucial de la montée : l'heure de départ. Trop tard, le lever du soleil nous prend par surprise dans la montée, c'est pas top. Et le temps de finir de monter, puis de redescendre, nous voilà cramés par le soleil. Trop tôt, on est obligés d'attendre dans le froid au sommet, et d'en mourir. Il faut donc bien gérer pour être toujours en mouvement, et arriver juste avant le lever du soleil.
Le temps de grimpette pour la Fujinomiya route est estimé à 5 heures. Le lever du soleil est peu avant 5h, il serait donc bon d'être là vers 4h. Et comme je boite, faudrait mieux prendre de la marge. Nous voilà donc parti à 21h.
Moustiques browniens
Départ : 富士山表口五合目、標高2400m
La pente nous fait transpirer dès les premières centaines de mètres. Malgré les petits groupes de gens au départ, et le fait qu'on soit sur un week-end de 3 jours, c'est plutôt calme. Par contre, c'est nuageux, et je suis pas très confiant pour le lever du soleil …
Puis tout à coup …
… tout à coup …
On passe la couche opaque, et on se retrouve à la surface d'une mer de nuages, silencieuse, éclairée par la lune brillante. C'est vraiment prenant.
Le plus surprenant, c'est le silence assourdissant. On entend pas les autres grimpeurs, trop éloignés de nous. On est vraiment isolés. Mais pas comme dans des recoins naturels, sans humains mais avec le bruit des oiseaux, des voitures au loin, des vagues, du vent, des petites bêtes … ici c'est un vrai silence, il n'y a absolument rien dans l'entrée son, même pas un bourdonnement parasite. On doit pas être faits pour ça, parce que ça m'a fait un peu bizarre. On dirait que les oreilles pèsent plus lourd.
Quelques photos immortalisatrices
Il n'est pas encore minuit, et on est déjà à la 8ème station. Il faut ralentir sans caler.
Calé au 八合目
Observatoire de l'infini
Le mont Fuji est en fait impressionnant par la simplicité de sa forme. On voit à la fois la procession de petits humains monter tout droit, et les étoiles.
Ménisque céleste
Pas encore 1h, et déjà au 9ème anneau 九合目
Offrandes
On est bientôt au sommet glacial, mais avec beaucoup trop d'avance. On fait donc une sieste ici, en cherchant un coin à l'abri du froid, mais les meilleures places sont prises.
La forte lumière, c'est un distributeur automatique … hé oui, même à 3460 mètres d'altitude
2h, dans les rochers pour la dernière ligne droite
3h25, arrivée au sommet après une petite file indienne
4h04, on a trouvé un bon spot, le spectacle commence …
4h13, les appareils photos sont dégainés
4h44, le voilà, le 御来光, le fameux lever du soleil
Au ralenti et commenté, voir celui de l'année dernière.
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Et hop, fin du spectacle, tout le monde descend
On range les appareils photos …
… et rares sont ceux qui restent
Les gens super-équipés se précipitent vers la "sortie"
Certains prennent la pose …
… ou testent du matériel
Goulot de sortie
Nous, on va faire un tour au bistrot, celui ou tout le monde s'entasse pour manger un cup ramen de luxe.
La cantine du Fuji-san
Puis séance de cartes postales, au bureau de poste du Fuji-san
Et enfin, 7h, on redescend
On aperçoit peu à peu la verdure du bas du volcan, et même le parking du bus du retour
Fuji-sieste
ちょっと危険
Pause à l'observatoire de l'infini, de jour cette fois-ci
On monte droit dans le bus, et on est de retour à 新富士 la gare ShinFuji à midi, bien claqués. C'était le baroud d'honneur de mes Salomon XCR Pro 3D, qui sont maintenant en 4D, après leur 3ème Fuji, entre autres trails.
Fuji-smelles
Conclusion : On savait déjà que les enfants et les petits vieux pouvaient gravir le mont Fuji. Maintenant, on sait que même les boiteux y arrivent.
Récompense peu glorieuse : ヨーグルトケーキ, Yoghourt Cake. Y'a pas de quoi en faire un fromage
Et la suite du Fuji, ça se passe juste à coté, à Hakone.
>> Hakone |
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