Thaïlande (4) - Du plat aux montagnes
[07 mars] : Khlong Lan – Tak (〜120 km)
Par la faute du lit confortable, je ne me réveille qu'à 8h. Toutes les chaînes TV diffusent un hymne et des belles images de la Thaïlande.
Après un café et quelques centaines de mètres en vélo, je suis de nouveau opérationnel et repositionné, car Nicky m'avait fait perdre mes repères par un trajet de nuit en voiture.
Je décide d'aller voir la Khlong Nam Lai waterfall, qui doit être suffisamment remarquable pour être indiquée en anglais le long de la route. Cela m'impose un détour de 2 fois 6 km. Je prends une pause préventive pour breakfaster des noodles, 2 bols, et un dessert typiquement thaï des hautes températures, de la glace pilée assortie de jelly cubes.
Repas typique à 20 baht, un bol de nouilles de riz avec des bouts de viande, et toujours les 4 assaisonnements + les cacahuètes broyées
La route jusqu'à la cascade est toute neuve et déserte
La cascade fait partie du Khlong Lan national park, et on me demande 200 baht à l'entrée !
Panneau discriminatif pour les Thaï / étrangers
Je grimpe en haut de cette cascade, pas si impressionnante par rapports aux moyens mis en œuvre pour la signaler, même si c'est un beau coin tranquille.
Khlong Nam Lai waterfall
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Je participe gratuitement à une séance photo désormais traditionnelle avec des jeunes écolières, échange 100% de mes capacités lexicales, et vais m'installer une petite heure avec 2 Thaï et un Taïwanais qui pique-niquent du whisky Red Bull distillery et du riz à tremper dans une sauce.
J'ai déjà oublié mon faible mandarin, mais le Taïwanais parle un petit peu japonais et les Thaï un petit peu anglais. Un de ces derniers est surpris, en condamnant la décision, de voir mon ticket d'entrée payé 200 baht (tarif honteux et gouvernemental pour les non-Thaï), alors qu'il a payé le sien, le même, 30 baht. Son pote Taïwanais (qui ne parle pas un mot de thaï) a payé aussi 30 baht, démontrant la misérable puissance de discrimination faciale des gardes à l'entrée.
Je repars de la cascade et tente de rejoindre la route principale par une route rouge sur ma carte, légendée de "main road", qui boucle ma petite boucle de 2 x 6 km. Tout à coup, cette main road laisse place à une piste Paris-Dakar. C'est même très chaud à un moment, avec des grosses crevasses en descente. Je commence à réaliser que ma carte c'est vraiment n'importe quoi.
Il y a au moins les fils électriques
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Je m'arrête dans une maisonnette isolée, officiant comme épicerie, acheter de l'eau. Je finis par y rester pour plus longtemps après avoir vu les poulets, j'en commande un succulent pour 120 baht, accompagné de son riz et de ses cubes de mangue. Je ne repars qu'à 15h, le ventre trop plein et un demi-poulet restant sur la banquette arrière. Je n'ai presque pas de kilomètres engrangés dans la journée et je me perds sur ces routes pourries.
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Je tente à la volée une dernière bifurcation qui semble partir dans la bonne direction cardinale. Les numéros des routes sur les bornes parfois présentes étant en désaccord complet avec ma carte, je ne peux que me fier au relief autour de moi et le fait coller avec celui de ma carte. Ca marche plutôt bien. Une fois en croisement de confiance géographique, je réalise que j'ai pris en fait une "minor road" de ma carte, mais pavée, alors qu'hier c'était une piste Paris-Dakar.
Des humains
QQQ, une marque de maïs ou le jingle des 99 shops ?
En réexaminant le relief, j'ai le sentiment certain qu'hier j'étais proche de la fin et au bon endroit lorsqu'on m'a indiqué de faire demi-tour.
Fin des classes = sortie de scooters + vélos, pour une école qui doit rassembler les enfants des maisons dans un rayon de 20 km de campagne
Je fonce la tête dans le guidon sur la ligne droite. J'arrive à un panneau "Tak : 53 km" à 16h48 et me lance le défi d'y arriver. Je finis par 30 km de route 1, large route, mais le trafic est faible et je suis tranquille sur ma voie réservée aux 2 roues.
Il fait nuit dangereuse vers 18h45, et j'arrive à 19h01 au km 0 après ma moyenne maximale que je ne peux pas dépasser en plat. Les 6 derniers km en arrivant sur Tak sont une piste cyclable réservée aux vélos.
Mes jambes sont cuites et je me trouve un internet café, 35 baht les 2 heures. Etant averti des keyloggers et autres trucs louches souvent installés, je surf sur mon firefox portable en entrant mes passwords par du copier-coller à la souris. Pour les plus paranos, il y a XeroBank xB Browser, nouveau nom de Torpak, mais qui ne passe pas tout le temps.
Je fais quelques courses pour accompagner mon poulet et me dirige vers l'hôtel le moins cher, repéré un peu plus tôt. Mais le gardien très froid me fait comprendre que c'est plein, et je vais vers la 2ème solution. Là aussi c'est plein, mais la fille de l'accueil me trouve une chambre de libre dans un hôtel voisin et m'y fait escorter. Il s'avère que c'est l'hôtel de ma première solution, mais le tenant paresseux avait préféré cacher la chambre libre.
Il me demande mon passeport pour remplir la fiche de rentrée, mais je gagne ma revanche en lui sortant ma carte d'étudiant en japonais.
Je me fais mon festin devant la télé, avec une Singha, la célèbre bière thaï, et mon reste de poulet-riz du midi
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Dessert succulent, mais innommable
Exemple de chanteurs Thaïs. Les danseuses ont toutes la peau bien blanche, ce qui n'est pas le cas de la plupart des Thaï que j'ai croisé en chemin …
Exemple de chanteurs Thaïs. Les danseuses ont toutes la peau bien blanche, ce qui n'est pas le cas de la plupart des Thaï que j'ai croisé en chemin …
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[08 mars] : Tak – Mae Sot (85 km)
Après un bref check internet, où je découvre que je peux aller visiter Myanmar (la Birmanie) dans la journée, je me lance en direction de Mae Sot, la ville frontière. Ce n'est qu'à 80 km, mais avec un col (d'après la carte entre 700 et 1100 mètres), donc je dois avancer vite si je veux profiter de ma visite internationale en fin d'après-midi.
Du plat aux montagnes
Une fois sorti des maisons et bien en ligne sur la route, je m'arrête petit-déjeuner un khao-phat à un stand repas. Pendant que les gens autour rigolent de savoir que je vais a Mae Sot en vélo (un signe tout à fait non-réconfortant), un camionneur me file un bamboo stick que je range dans mon filet. J'aperçois dans une jeep mon premier occidental depuis que j'avais quitté Bangkok.
Dans un virage ...
Après 15 km, ça commence à monter. C'est bien rude et je passe en mode pousse-vélo, ce qui précipite la consommation de mon bamboo stick. Il faut en fait le casser et l'éplucher, le riz étant à l'intérieur, avec des pois rouges. C'est du riz collant mais très sucré et super bon.
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Grand 8 nature
Le paysage n'est pas top, bien brumeux, et y'a du feu partout.
Le col, Doi Musoe, 870 m. "doi" = "mont"
Petite pause
Dans le plat du col, il y a un étrange marché avec des gens. Ce sont en fait les gens des hilltribes, i.e. les tribus des montagnes qui peuplent les montagnes du nord de la Thaïlande. Ce sont les premiers que je vois. Ils vendent principalement des légumes, je ne trouve même pas de fruits. Ils ne sont pas très souriants.
Hilltribe market
Au café (ice), un poster du très fameux pont … d'Iwakuni (岩国), ville de la préfecture de Yamaguchi. Iwakuni est aussi connu pour héberger les indésirables Marines américains
En effet, la Thaïlande est au nord occupée, surtout dans les montagnes, par les hilltribes. Ce sont des tribus qui habitaient au Tibet et en Chine, mais qui en ont été chassé, et occupent à présent la Thaïlande, Myanmar et le Laos, directement au sud de la Chine. Des nombreux groupes ethniques se distinguent 6 tribus, Akha (0,5 M), Lahu (1 M), Karen (7 M), Hmong (Meo, 5 M), Mien (Yao, 3 M) et Lisu (1 M), chacune avec sa langue et ses coutumes. Par ailleurs, les Hmong sont près de 300000 aux USA et 15000 en France, dont une colonie en Guyane.
Si certains Hmong ont émigré et vivent comme la plupart des gens qui ont internet s'imaginent qu'on vit normalement, d'autres sont encore coincés dans les forêts du Laos, victimes des guerres coloniales. Ce reportage [fr] très intéressant est loin d'être 30 minutes de perdues.
Pour la plupart des tribus que je verrai, elles sont soit laissées tranquille dans la nature, soit objets touristiques.
Arbre généalogique de ces tribus tibétaines
Habits traditionnels hmong
Puis j'attaque la descente, qui est une grosse blague. Ma carte de reliefs n'indiquait pas que ce n'est pas une descente, mais des dents de scie sur des dizaines de kilomètres. …
Un autre marché sur la dent suivante
D'abord surpris par voir des gens vendre des trucs en haut d'un col aux 3 poids lourds de la journée, je découvre maintenant des excursions touristiques
On aperçoit la route qui remonte au loin …
Souvent, il y a des camps, colorés, tout en bois, et bien jardinés. On dirait des postes de police ou des postes forestiers
Ayant abandonné l'idée d'arriver à Mae Sot assez tôt pour visiter Myanmar, je m'offre des pauses régulières
Zone "ça passe"
Au pied d'étranges falaises, se dressant au milieu de rien, je trouve un petit temple et un grand Buddha. Tous les véhicules qui passent devant le temple klaxonnent.
Buddha et Naga
La "magic hill" est une montée qui se fait soi-disant sans forcer, car c'est en fait une descente. Mais à ma déception l'illusion n'a pas marché …
Fire Index : High
La petite maison dans la prairie
Les statuettes d'un temple en chemin
J'arrive enfin dans Mae Sot à 15h30. Je check les guest houses à l'internet café, tout en dégustant des fruits frais prédécoupés pas chers. J'ai une belle chambre pour 150 baht chez Lusy (je check in en même temps que 2 Japonaises, dont une de 高槻 Takatsuki, à quelques kilomètres de Kyoto), et après une lessive et une douche froide, je suis prêt à découvrir la ville de 100000 habitants (comme Tak, mais qui paraît beaucoup plus petite).
Je profite du temps de jour restant pour trouver un massage thaï. Mes recherches infructueuses me mènent à la sortie de la ville, où j'avais préalablement spotté un panneau "Thai massage" en alphabet romain. Je m'attends donc au piège à touristes, mais ce n'est que 200 baht (4 €) les 2 heures ! C'est dans une belle maison en bois. J'enfile mon pyjama jaune et j'attends sur un matelas au sol, dans une chambre à part, la masseuse.
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Elle commence soft et c'est agréable. Mais elle commence petit à petit à me grimper dessus, avec les bras et les genoux sur mes bras et mes cuisses. C'est assez torturant pour me faire regretter de ne pas m'être étiré plus longtemps en descendant du vélo. J'ai l'impression qu'elle me plante ses os dans mes courbatures.
J'avais un peu mal à l'entrejambe gauche, sûrement à cause d'un pédalage trop vite sur du plat quand le braquet se fait trop petit. Je me demande c'est quoi le pire, pousser le vélo en montée ou pédaler du vent ? Mais elle la masseuse me fait vite oublier mes interrogations en me faisant mal partout. Surtout qu'elle devait bien faire 2 fois la taille d'une Thaï habituelle … Je suis au final massé partout, de bas en haut, mais sur le segment [mollets - épaules] ça s'apparente plus à de la torture. Je repars positif, en imaginant avoir des muscles tout neufs le lendemain.
Stupa à Mae Sot. Influence birmane ?
J'erre ensuite en ville dans la nuit, grignotant et regardant Manchester-Portsmouth de la FA Cup, une compilation de buts tout faits ratés qui voit Ferdinand en gardien pour finir.
Sur le portique de ma guest house, les Japonaises se plaignent à la tenante de ne pas avoir d'eau chaude et se font prendre d'assaut par les moustiques, en me laissant intact juste à coté, hé hé. Pour une fois …
Résumé du premier quart : environ 650 km, de Bangkok à Mae Sot
1 commentaire:
Hum.. Et depuis mars tu as disparu ?
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