Le Transmongolien : De Pékin en Mongolie
Réveil à 6h30 pour être à mon départ à 7h45. Immergé dans la mégalopole, j'ai la chance d'être pas trop loin de la gare centrale de Beijing. Je prends au passage les habituels cup ramen, des fois que le wagon restaurant pratique des prix pas pratiques.
Mon train, c'est le Transmongolien, une ligne gigantesque partant de Pékin, passant par Oulan-Bator, et qui se connecte plus haut, près du lac Baïkal, au fameux Transsibérien. Jusqu'à la capitale mongole, j'en ai pour 33 heures.
Rien à voir avec la Beijing South Station qui ressemble de haut à un stade de foot couvert, voire une soucoupe volante, la vieille Beijing Main Station
Facile à repérer mon train, écrit dans les 3 langues des 3 pays qu'il va traverser
Le train à l'air vieux, avec pas grand monde autour (je suis pas en avance non plus) et le style à moitié chinois à moitié russe lui donne un aspect pas rassurant. J'ai l'impression d'être un grand voyageur au début du XXème siècle qui va écrire un roman avant l'arrivée.
Je suis au tarif le plus bas dans ce train plutôt cher pour la région. Je suis "hard sleeper" dans une cabine de 4, en collocation avec 2 Australiens d'Alice Springs. Apparemment les Chinois ont leurs wagons, les Mongols aussi, et les "vrais étrangers" sont regroupés. Il y a en tout 16 voitures.
On quitte la capitale chinoise sous un ciel gris, mais il change vite pour un beau ciel bleu. Pollution effect ?
C'est parti !
Notre cabine pour 4
Les horaires complets, de Beijing à Ulan-Ude
Le chauffe-eau équipé de sa vue en coupe descriptive
Le couloir
Mes cup ramen chinois … livrés avec une fourchette à l'intérieur !
Vu qu'on a quitté l'agglomération, on peut admirer les splendides paysages par les fenêtres. On passe des dizaines de tunnels dans des vallées abruptes et profondes. Ca me fait penser à Taïwan, les gorges de Taroko
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Puis le terrain s'aplatit. Je suis toujours accoudé à la fenêtre pour regarder la Chine défiler. Il y a plein de déchets au bord des rails, comme ceux que les Mongols du wagon jettent de leur cabine à travers la fenêtre opposée. Ils sont venus aux JO de Pékin, supporter leurs champions Naidan au judo et Enkhbat en boxe offrir à la Mongolie les 2 premières médailles d'or de son histoire.
Il y a des tas de charbon partout. La Chine est le premier producteur, consommateur et exportateur de charbon au monde
En gare intermédiaire
Notre couple de gros Mongols dans un compartiment du même wagon insulte les Chinois qui sont à quai. Ca les fait rire (les Mongols). Ils sont à peu près 2 fois plus gros et font 4 fois plus peur, mais me donne un petit aperçu des relations sino-mongoles …
Vers 14h30, pris par la faim, on part à 3 au wagon restaurant. On y restera jusqu'au coucher du soleil, en enchaînant les bières pas fraiches.
Traversée de la première classe
Un gros Mongol, un reporter indépendant, et le Chinois qui apporte les bières pas fraiches en retard
Le Chinois aux cheveux pas crédibles
On trouve encore des pâtés de maisons
Le ciel est maintenant d'un bleu pur, les températures plus fraiches et l'air conditionné, comme d'habitude, super froid. On se rend au dernier des 16 wagons pour une séance photo au soleil couchant.
Les rails foncent droit vers le Nord
Voir son train foncer sur les rails, c'est un peu comme se laisser aller sur son propre destin
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L'ombre du Transmongolien
On traverse des champs d'éoliennes
Activité divertissante : lire les commentaires des autres voyageurs (lol)
On traverse la Mongolie Intérieure. C'est l'appellation de cette région autonome de la Chine, comme le Tibet, désertique et constituée à 80% de Hans, 17% de Mongol, et 1 vingt-quatre millionième d'homme le plus grand du monde, Bao Xishun.
Il est 20h30 lorsqu'on arrive à la frontière chinoise, après plus de 12 heures et 842 km de train. La ville-frontière s'appelle Erlian ou Erenhot. Un bled paumé dans le sud du désert de Gobi. On nous pique nos passeports avant de nous autoriser à descendre. C'est pas très rassurant, et les gardes chinois pas très souriants ni utiles mais bon, on fait comme tout le monde.
Welcome in 二连 Erlian, un accueil bien froid. Sauf les mascottes des JO, présentes même ici
L'écartement des rails en Chine est le standard de 1435 mm, alors qu'en Mongolie il fait 1520 mm. A la frontière, ils doivent donc changer les bogies sous les wagons, tâche monumentale. Je suppose que c'est pour ça qu'on nous fait tuer 3 heures dans le bâtiment de la gare.
Heureusement qu'il fait nuit, sinon pourrait se rendre compte d'où on est :
Il y a un duty-free shop et un magasin chinois qui recèle presqu'uniquement de la bouffe périmée. Mais il y a du comestible pas cher, 18元 les 5 kg de riz, par exemple. J'y trouve mon compte avec des bonbons Haribo et du dentifrice (4元 = 0,4€ pour du Colgate, comme quoi ça vaut pas le coup de bien préparer sa valise avant de partir). Une fois que les passagers du train ont vite fait le tour des 2 magasins, on s'entasse dans le hall comme des réfugiés, sans ticket de train, ni passeport, à 2 pas des portiques d'immigration non surveillés, et personne pour nous informer. Les autres Occidentaux, une trentaine environ, n'en savent pas plus que nous. On est laissés à penser que vu que tout le monde est encore là, on n'a pas de raison de s'inquiéter.
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Finalement, la foule bouge. A minuit, on retourne dans le wagon en récupérant notre passeport. Le train n'a pas bougé, donc ils n'ont pas fait le changement de rails, chose que j'attends avec impatience. En effet, il parait que des grues soulèvent les wagons et les posent sur les nouveaux essieux, et reconstituent le train sur la voie mongole.
Je m'endors sur ma couchette 10 à 20 minutes, et je suis réveillé par une Mongole militaire bien en chair qui me demande mon passeport et se tire avec. Ai-je loupé le changement de rails ? C'est pas possible qu'ils aient transporté le wagon en l'air avec une grue et moi dedans sans que je me réveille (quoique j'ai raté plein de tremblements de terre au Japon à cause de mon sommeil). Mes collocs n'en savent pas plus, on est tous trop fatigués. Ne pouvant pas lutter je sombre une fois de plus dans les bras de Morphée.
Lorsque je rouvre les yeux, il est déjà 5h du matin, mon passeport est posé sur ma couchette à coté de moi. Ouf ! Mais j'ai donc tout loupé. Je jette un œil au dessus du volet coulissant, ce n'est que du sable ! On est en plein désert de Gobi, que le Transmongolien doit traverser pour rejoindre Oulan-Bator.
Je ne saurais jamais quand et comment est effectué ce changement de rails d'espacement différent, mais au moins mon passeport est retourné sain et sauf entre mes mains.
Bref … ben je me rendors jusqu'à 10 heures.
Episode miroir : Retour en Chine par la frontière Zamin-Uud / Erlian
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